Si vous avez déjà fait des fêtes foraines, vous n’avez pas pu rater les stands de machines à sous. Que ce soit des flippers, attrape-peluches ou encore bornes d’arcades, vous trouverez largement de quoi jouer votre argent, notamment avec les pousse-pièces (ou Coin Pusher en Anglais).
Logiquement, si vous lisez cet article, c’est que vous connaissez déjà un peu le principe, mais je vais quand même faire une piqûre de rappel !
Un Coin Pusher est une machine à sous qui fonctionne avec des jetons conçus pour ces dernières. Vous pouvez obtenir un pot de jetons contre une dizaine d’euros environ, même si les prix diffèrent d’un stand à un autre. Il peut également arriver que des Coin Pusher fonctionnent directement avec de l’argent (c’est généralement le cas en Angleterre).
Une fois les jetons en main, vous devez les insérer dans la machine pour pouvoir faire tomber ceux déjà présents à l’intérieur. Disposés sur ces jetons, vous trouverez des plaquettes de points ou même des petits lots à gagner directement. Ces points pourront vous permettre d’avoir un gros lot en fin de partie. Mais ne vous y trompez pas, il est très rare d’être chanceux et de gagner un gros lot sans avoir dépasser son prix d’origine en jeu.
Personnellement, je fais partie de ces gens qui aiment jouer à ces machines à sous juste pour le plaisir de voir l’augmentation du nombre de points gagnés au fur et à mesure, et de partager un moment avec des amis. Je ne joue pas à ces machines pour espérer gagner un lot intéressant. C’est pourquoi j’ai eu cette idée de concevoir ma propre machine, il y a maintenant 10 ans.
Alors pourquoi fabriquer soi-même une machine pareille ? Pourquoi ne pas en acheter une toute faite ? Pourquoi ne pas juste jouer dans une fête foraine ?
D’une part, jouer en fête foraine coûte cher, très cher. On parle d’environ 30€ pour jouer 15 minutes si on ne tombe pas sur une machine trop perdante. De plus les fêtes foraines bougent, et parfois il faut attendre un an pour pouvoir y rejouer.
D’autre part, l’achat d’une machine neuve est complexe. Peut-être que vous arriverez à trouver un fournisseur français (et bravo !), mais il ne faudra pas vous attendre à ce qu’elle coûte moins de 1000€. Mais la plupart des fournisseurs (comme vous vous en doutiez) viennent de Chine. Vous pouvez trouver des machines pour environ 1000€, parfois moins. Cependant, il faudra compter autant voire plus rien qu’en livraison. Et je n’ai pas un tel budget pour ce genre de projet.
Il n’y a rien de plus satisfaisant que de pouvoir utiliser du matériel local, nos connaissances et juste prendre un peu de son temps pour bricoler ! Bien sûr, cela demande quelques connaissances et un peu de matériel, mais je vais vous présenter tout cela par la suite.
1ère étape : Imaginer le Coin Pusher
C’est bien beau de vouloir fabriquer une machine à sous, mais déjà il faut l’imaginer. Dans cette phase, je me suis inspiré de plusieurs fabrications. Je suis loin d’être le seul à avoir eu cette idée, il existe plusieurs forums en ligne qui présentent des projets similaires plus ou moins finis. Vous pouvez aussi trouver des vidéos sur YouTube.
Je vais vous faire une liste de mes sources d’inspirations ici :
- Back to the future — projet de Jeremiggy sur le forum Gamoover
- Monopoly maison — vidéo projet de ThierryFG sur YouTube
- De manière plus générale — le forum Gamoover est très pratique !
Autrement, les quelques schémas disponibles sur Google Images peuvent vous aider.
Pour ma part, j’ai décidé de réaliser des croquis sur papier avant toute chose. Ma seule contrainte dans ce projet était la taille de la machine, elle ne pouvait pas dépasser 50cm de large et de long.
Une fois le croquis fait, je suis passé sur un logiciel de modélisation 3D — Solidworks. Vous trouverez le fichier 3D en fin d’article !
Le fait de modéliser la machine m’a permis de connaitre exactement toutes les dimensions des planches et de pouvoir réaliser un plan de découpes selon les matériaux disponibles.
En effet, connaître à l’avance le type de planche que vous allez utiliser est important.
2ème étape : Réaliser la structure
Je me suis décidé à prendre du médium (MDF) de deux épaisseurs — 12mm et 15mm. Le MDF est plutôt résistant comparé à de l’aggloméré ou de l’OSB, et c’est bien moins cher que des planches de pin (qui seraient de toute façon gâchées car le pin ne serait pas visible à la fin du projet).
Pour réaliser la structure en ayant le moins de chutes possibles, j’ai regardé les planches les plus adaptées parmi tous les magasins de bricolage et j’ai réalisé des plans de découpes :
Le reste des chutes de la planche de 12mm d’épaisseur sera utilisé pour un autre projet !
Maintenant, le plus dur est à faire : reporter toutes les mesures sur les deux planches de MDF. Il faut y aller à son rythme et ne pas se précipiter car la moindre erreur vous fera perdre énormément de temps par la suite pour rattraper les défauts de mesure.
Je vous conseille d’être bien équipé pour cette phase (les liens sont à titre d’exemple) :
- Une règle d’architecte d’au moins 1m
- La même règle mais en 30cm pour les petites mesures
- Une équerre de menuisier pour vos plus beaux angles droits
- Des crayons gras pour vos tracés sur MDF
Le traçage prend beaucoup de temps, donc autant être le plus fiable possible avec ces outils ! Ce n’est qu’au bout de 4–5 heures intenses que le traçage est enfin fini. Faites bien attention à vos planches car elle ne sont pas forcément à angles droits sur les quatre recoins, cela m’aura valu de recommencer plusieurs traçages car la partie gauche de la planche était moins longue de 2cm que la partie droite.
La prochaine étape est de découper les planches. Pour cela il vous faut d’autres outils tout autant importants, que ce soit pour la précision de vos découpes ou pour votre propre sécurité.
Il existe plusieurs façons de faire des découpes. J’ai choisi d’utiliser une scie-sauteuse pour sa simplicité d’utilisation et sa liberté de mouvement. Toutes mes découpes sont faites à la scie-sauteuse et à la perceuse.
Je vous fais une nouvelle liste d’outils à avoir pour cette phase (les liens sont de nouveau à titre d’exemple, je n’ai pas de recommandations particulières) :
- Des tréteaux — obligatoires pour réaliser vos découpes.
- Des serre-joints pour faire tenir vos planches aux tréteaux.
- Une paire de lunette de sécurité — Protégez-vous un maximum !
- Un masque anti-poussière — Si vous êtes en intérieur, c’est très important !
- Un casque anti-bruit — Protégez vos oreilles du bruit de la scie-sauteuse !
- Une lame pour bois et une lame pour métaux pour votre scie-sauteuse.
- Enfin, une scie-sauteuse pour faire vos découpes.
C’est vrai, cela fait pas mal d’équipements, mais c’est un investissement à long terme. Ne négligez surtout pas votre sécurité, un morceau de bois ou de métal peut très vite vous blesser si vous n’êtes pas correctement équipé. C’est pourquoi je vous recommande de prendre une bonne paire de lunettes de sécurité qui ne laisse pas d’ouverture possible, un masque anti-poussière (voire un masque à gaz si vous pensez faire de la peinture à bombe), et un casque anti-bruit (ou au moins des bouchons d’oreilles). Puis surtout, prenez des outils de qualité, le bas de gamme risque de vous limiter rapidement dans vos projets.
Lors de vos découpes, je vous recommande l’utilisation d’un aspirateur pour enlever la sciure produite. Évitez d’utiliser votre aspirateur de maison, sinon vous allez devoir le nettoyer après chaque session de découpe (ce que j’ai dû faire).
N’hésitez pas à utiliser des guides pour que vos traits de coupe soit les plus droits possible !
Une fois que vous avez toutes vos planches bien découpées, il ne reste plus qu’à tout assembler. Encore une fois, vous avez plusieurs façons de faire. Étant plutôt amateur, je n’ai appris que trop tard la technique des tasseaux de bois pour avoir les planches bien droites lors du montage. J’ai utilisé de simples équerres en métal (ce qui n’est pas du tout rentable au niveau du prix).
Le plus gros est maintenant derrière nous. L’assemblage devrait se dérouler sans accroc, car nous avons déjà réalisé le plan de montage en amont. Il faut simplement bien suivre le plan à la lettre et ne pas hésiter à faire quelques corrections si nécessaire.
Le gros de la structure est vite sur pied. Au bout de deux heures d’assemblage, on a déjà un aperçu du résultat final.
La prochaine étape est d’assembler le plateau de jeu. C’est la pièce maîtresse de la machine, il est donc crucial qu’elle soit parfaite.
Une fois cela fait, on peut commencer à ajouter de la décoration. J’ai découpé quelques morceaux d’aluminium en même temps que les planches pour pouvoir décorer l’intérieur.
Il faut ensuite faire des découpes sur les côtés pour laisser les pièces tomber, sinon la machine sera bien trop facile et perdra de son intérêt.
3ème étape : Installer le mécanisme
Pour que le Coin Pusher fonctionne, il nous faut un système électrique avec un moteur pour pousser les pièces.
Pour cela, j’ai pris un moteur d’essuie-glace d’une Citroën AX trouvé pour 12€ sur Leboncoin. N’importe quel moteur d’essuie-glace fera l’affaire, le but étant d’avoir un moteur plutôt lent avec une très bonne capacité de charge.
Pour faire fonctionner le moteur, je dois l’alimenter en 12V. J’ai donc réalisé un schéma électrique rudimentaire pour vous expliquer l’installation.
La machine est alimentée entièrement en 12V grâce à une alimentation 220V vers du 2x 12V et 15A. Comme je ne connais pas l’alimentation en ampère du moteur, j’ai pris large pour être sûr de pouvoir délivrer assez de puissance au moteur lors de son démarrage.
Le moteur consomme un pic d’électricité lors de son démarrage, ce qui peut faire sauter votre alimentation si elle ne délivre pas assez d’ampères. Certaines personnes utilisent une alimentation d’ordinateur fixe pour ce genre de projet, mais une alimentation d’ordinateur dispose de plusieurs sécurités pour éviter une suralimentation et peut bloquer le démarrage de votre moteur.
Si vous branchez le moteur directement sur l’alimentation, vous verrez qu’il tourne à pleine puissance, ce qui est normal. Pour notre projet, il doit tourner au ralenti. Donc soit vous connaissez la fiche technique de votre moteur et vous arrivez à faire baisser sa rotation, soit votre moteur tourne déjà à la bonne vitesse, soit vous devez, comme moi, utiliser un potentiomètre entre les deux pour pouvoir baisser la tension jusqu’au moteur.
Sur le 2ème plot 12V de mon alimentation, j’ai branché en dérivation mes deux lumières pour éclairer l’intérieur de la machine côté plateau, et j’ai également branché quatre ventilateurs pour pouvoir aérer l’intérieur et refroidir le moteur et le potentiomètre qui vont chauffer.
Une fois le tout branché, j’ai installé au-dessus du moteur le plateau mouvant sur rail. Cela permet au plateau de coulisser correctement. Il faut faire très attention que les pièces ne passent pas entre votre plateau de jeu et le plateau mouvant.
Et maintenant, on teste notre moteur :
Une fois que le moteur fonctionne, il ne reste plus qu’à mettre la cascade. C’est cette partie qui va permettre de faire tomber les pièces sur le plateau mouvant.
Je n’ai malheureusement pas pris beaucoup de photo durant cette étape. Il faut prendre deux plaques de plexiglas et les découper à la bonne taille. N’enlevez surtout pas les films protecteurs du plexiglas, ils seront très utiles pour faire des traits au crayon/stylo.
Réalisez une matrice de trous sur le plexiglas, ils seront utilisés comme repère pour y mettre des vis. Les pièces tomberont moins vite et cela rendra votre machine plus intéressante.
Vous pouvez aussi prendre un tuyau d’aquarium. Il vous faudra le découper en plein de petits morceaux, pour ensuite les mettre autour des vis entre les deux plaques de plexiglas. Cette étape peut être assez pénible, mais il faut bien prendre son temps car on risque de créer des fissures dans le plexiglas.
Une fois votre cascade installée, il faut encore faire des fentes à l’avant de votre machine pour permettre d’y insérer les pièces.
4ème étape : La finition
Il ne reste maintenant plus qu’à ajouter une vitre sur l’avant et réaliser la décoration du Coin Pusher !
Pour la vitre, j’ai utilisé une 3ème plaque de plexiglas que j’ai découpée à la bonne taille. J’ai usé de mon imprimante 3D pour réaliser un support de vitre, comme on peut le voir sur la photo ci-dessous.
J’ai ensuite ajouté un verrou sur la vitre pour pouvoir la fermer et l’ouvrir facilement.
Maintenant il ne reste plus que la décoration de votre machine ! J’ai mis un bac en métal pour la récupération des pièces, mais une boîte de gâteau peut faire l’affaire. Et j’ai choisi de partir sur un thème que j’apprécie beaucoup : The Legend of Zelda.
J’ai réalisé sur Affinity Designer (un concurrent d’Adobe Illustrator) un design à l’échelle de la machine sur le thème de Zelda. Une fois l’illustration imprimée en vinyle, il ne restait plus qu’à peindre en noir la machine et y appliquer l’image.
Voici le lien pour télécharger l’image final si jamais cela vous intéresse.
Je vous présente enfin le résultat de tout ce travail, ma machine Coin Pusher sur le thème de Zelda :
J’espère que le rendu vous plaît autant qu’il me plaît ! Cela m’a demandé plusieurs jours de travail intense, environ une semaine pleine si je mets bout à bout toutes les heures passées dessus.
Au final, j’ai dépensé un total de 400€, en comptant les outils que je ne possédais pas comme la scie-sauteuse. Dans tous les cas, cela revient à bien moins cher que d’acheter une machine neuve non personnalisée, ou encore de jouer directement en fête foraine.
En ce qui concerne les fichiers de modélisation 3D, je les met à disposition gratuitement sur le site Thingiverse.
Je vous remercie d’avoir lu et n’hésitez pas à donner votre avis en commentaire !